Comment les interventions basées sur le sport peuvent-elles améliorer la santé chez les filles et les femmes ? Une étude de portée

Le sport est reconnu par l’OMS comme un facteur sous-utilisé de la PA mondiale dans toutes les catégories d’âge, et la charte internationale de l’UNESCO identifie le sport comme un droit fondamental pour tous et comme un élément clé de la réalisation des objectifs de développement et de paix. De plus, l’entité des Nations Unis pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes a mis l’accent sur le pouvoir du sport pour s’attaquer aux inégalités fondées sur le sexe dans et par le sport. S'appuyant sur ces programmes mondiaux, l'initiative Fit for Life de l'UNESCO cherche à résoudre les crises combinées de l'inactivité physique, des problèmes de santé mentale, des inégalités sociales et des impacts des MNT chez les femmes et les filles, en mettant l'accent sur les efforts à faire à plusieurs niveaux et les politiques sportives inclusives pour réduire l'inactivité physique et les MNT.

La recherche d’études a été élaborée en consultation avec un documentaliste universitaire sur les bases de données PubMed, Web of Science et PsycInfo. Elle a été réalisée le 5 août 2022. Les données extraites des études étaient les caractéristiques démographiques des participants, le cadre et la conception de l’étude, l’approche de la recherche, l’intervention, les résultats / centres d’intérêt en matière de santé, les méthodes de collecte des données, les résultats à court et à long terme, et les suggestions d’orientation futures pour la recherche. 

Au final, seulement 4 études répondant à tous les critères d’éligibilité ont été incluses dans cette étude de portée. Ces quatre interventions portaient sur des aspects de la santé des adolescentes telles que la violence fondée sur le genre, la prévention du VIH, la santé reproductive et le mariage des enfants. Ces quatre sources de données provenaient de deux projets principaux : Parivartan for Girls en Inde et Skillz Street en Afrique du Sud. Les participantes étaient des adolescentes âgées de 11 à 17 ans, et tous les programmes étaient dispensés par des jeunes femmes (âgées de 18 à 26 ans) issues des communautés où se déroulait la recherche. 

Les études de Parivartan for Girls ont utilisé le kabaddi comme base de leur intervention. Le kabaddi est un sport de contact populaire en Inde qui se joue entre deux équipes de 7 joueurs. Il a été choisi en raison de son adéquation avec le contexte, de sa familiarité auprès des membres de la communauté ainsi qu’en raison du peu d’espace et d’équipement qu’il demande. Les chercheurs ont postulé qu’en pratiquant un sport, les filles augmenteraient leur confiance et leur estime de soi, et qu’en aspirant à un objectif collectif, elles apprendraient les techniques de négociation et le travail d’équipe. L’hypothèse était que ces compétences seraient transférées dans la vie personnelle des filles et qu’elles leur permettraient de poursuivre leur éducation et de retarder le mariage. L’intervention comportait des activités sportives pour améliorer la condition physique, et des discussions participatives sur des sujets tels que la santé, le genre, la violence et le harcèlement sexuel pour améliorer la prise de conscience et la confiance en soi. Cette intervention a duré 15 mois, entre décembre 2015 et mars 2016, dans un quartier proche de Mumbai abritant principalement des familles musulmanes, où la visibilité des filles est restreinte par la ménarche, les burkas ou les salwar kameez.

Les études de la Parivartan for Girls ont souligné l’importance de la visibilité des filles participantes à des sports par leur famille et la communauté au sens large pour faciliter le processus de changement social dans les foyers et en dehors. Les approches basées sur le mentorat ont été identifiées comme efficaces pour créer des modèles locaux pour les adolescentes. Dans l’ensemble, les auteurs ont conclu que Parivartan for Girls avait modifié ce que la communauté considérait comme acceptable en ce qui concerne la participation des filles au sport et dans les espaces publics.

Bien que les sources de preuves soient peu nombreuses, les résultats suggèrent des changements positifs au niveau individuel et social dans la perception des normes de genre et de certains résultats liés à la santé (amélioration des connaissances, des croyances individuelles, des efforts familiaux …). L’analyse révèle tout de même qu’aucune des études n’a directement évalué l’impact du sport sur la PA ou les comportements liés à la PA chez les participants. De plus, les études se sont focalisées sur les adolescentes et les femmes adultes n’ont pas été représentées.

Aucune des études incluses dans la revue n'a examiné comment les interventions basées sur le sport pourraient contribuer à l'amélioration du comportement et de l'engagement dans la PA, que ce soit dans ou en dehors d'un contexte sportif. Or, les interventions basées sur le sport ont été considérées comme très pertinentes pour la santé publique, en particulier dans les populations vulnérables. Une meilleure compréhension de la manière dont les interventions sportives axées sur l’équité entre les sexes influencent la PA ainsi que la santé physique et mentale à court et long terme pourrait augmenter l’attrait de la participation sportive et faire progresser le domaine. 

Les études incluses dans cette revue décrivent des conditions sociales et environnementales complexes qui ont un impact sur le développement, la mise en œuvre et l'évaluation des interventions basées sur le sport, et qui influencent la participation des athlètes et des mentors/entraîneurs ; cependant, les résultats ont été mesurés aux niveaux individuel et social uniquement. Une récente revue systématique des facteurs associés à la pratique sportive chez les adolescentes a identifié des facteurs pertinents au niveau biologique, personnel, social, socioéconomique et environnemental, ce qui indique la nécessité d’adopter d’autres approches de recherche. De futures études appliquant des stratégies plus ciblées pour documenter les facteurs multiniveaux existants dans des contextes locaux de la vie quotidienne des participants pourraient constituer une base solide pour élaborer des interventions visant à éliminer les obstacles et inclure d’autres perspectives critiques actuellement négligées dans ce domaine telles que les conceptions hétéronormatives.

Du point de vue de l’engagement communautaire, tous les projets primaires ont été élaborés et menés dans le cadre de partenariats entre une ou plusieurs entités universitaires ou de recherche et une ONG locale ou régionale bien identifiée et ayant déjà des relations avec les communautés. En revanche, la description de la dynamique de pouvoir et/ou des stratégies de prise de décision partagée n’était pas présente. Les futures recherches devraient remettre en question les hiérarchies et le contrôle en identifiant et en discutant systématiquement de ces questions dans le cadre du fonctionnement interne de la recherche et des relations avec la communauté. De même, les approches de recherche participative ont été appliquées à certaines étapes de la recherche mais pas à toutes, et aucune des études ne les a intégrés dans les stades de l’analyse, de l’interprétation et de la diffusion des données. 

La revue a identifié une étude qui a utilisé une stratégie de santé numérique (SMS) pour renforcer l’engagement et l’apprentissage, ce qui a été bien accueilli par les participants et leur famille, qui ont salué le plaisir d’apprendre via la plateforme mobile et la confidentialité qu’elle offrait. Ces résultats font écho aux résultats récents d’études sur la santé numérique. La santé numérique a été définie comme une stratégie visant à renforcer l’équité en matière de santé parmi les femmes, et l’accès à de tels outils augmente dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Des progrès peuvent être réalisés par des voies telles que l’amélioration de l’accès aux soins et aux services de santé, les possibilités de saisir des informations pertinentes, l’autonomisation acquise grâce à l’accès à ses propres données de santé et l’amélioration de la visibilité de problèmes tels que la violence sexiste ou la discrimination.